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Le blog de totoche

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Des mots, juste des mots, mes mots.


Voyage au coeur du monde

Publié par totoche sur 13 Mai 2008, 11:35am

Catégories : #rêverie

J’avais deux ans la première fois.

 

Je ne voulais pas accompagner mes parents, alors, je m’étais enfuie dans le couloir et cachée dans un renfoncement.

Ils avaient mis longtemps avant de me retrouver, normal, lorsqu’ils avaient regardé dans mon recoin ils n’avaient pas pu me voir, je m’étais fondue dans le mur.

 

Moi, j’avais eu très peur de ne plus exister, de rester pour toujours dans ce petit coin, alors le mur m’avait rejetée et, bien sur, mes parents m’avaient retrouvée.

 

Il m’a fallu plusieurs années pour réussir à maîtriser cet exercice.

 

D’abord, il faut apprendre à ressentir les objets, leurs vibrations, leurs émotions.

 

Pour les murs, c’est assez facile, ils doivent se tenir droits, malgré le sol qui ondule sous leurs pieds, le vent qui souffle dans leur dos, le toit qui pèse sur leur tête.

Ca, c’est le minimum à comprendre pour qu’ils se laissent approcher.

Après, il y a toutes les sensations, la douceur du rayon de soleil, la caresse de la brise, la piqûre du clou, le fouet de la bise…

 

Mais lorsque vous avez réussi à vous faire accepter par un mur, alors seulement vous goûtez au bonheur de la petite fille qui vient compter jusqu’à dix sur vous, vous partagez l’amour du baiser qui s’échange à l’abri de votre corps, vous peinez avec le vieillard qui recherche son souffle dans vos pierres.

Il y a aussi les moments moins plaisants comme lorsque le nez de l’enfant est remplacé par la truffe d’un chien dont vous savez qu’il va se retourner et lever sa patte, ou encore lorsque les amoureux cèdent la place à la concierge qui vient battre le paillasson de l’entrée, lequel se venge en vous arrosant d’un nuage de poussière…

Un mur n’a pas le droit d’éternuer !

 

Après avoir testé mus, portes, vitres (quelle exaltation que de devenir transparente !) armoires, chaises, banc, j’ai essayé les végétaux.

 

Le premier à m’accueillir a été un érable majestueux, sensible et doux, rougissant aux audaces des bourrasques automnales.

J’essayais bien de le prévenir qu’il y laisserait ses feuilles mais, fataliste, il ne voulait aller contre sa nature.

Avec lui, il y avait aussi les enfants, les amoureux, les vieillards, et oui, et les chiens !

J’appris la succession des saisons, la sève des bourgeons, le parfum des fleurs, le crissement des feuilles.. Et encore, le craquement de la coquille qui se fend, la caresse rugueuse et veloutée des bois de cerfs, la bienfaisance régénératrice de l’ondée estivale, le chatouillis irritant des chenilles baladeuses…

Un arbre n’éternue pas, lui non plus !

 

Les arbres, les arbustes, voilà déjà une palette variée !

J’y ajoutais une multitude de fleurs, du timide myosotis au lys arrogant, et je plongeais voluptueusement me gorger de rosée, petite herbe dans un pré.

La nuit avait été douce, les étoiles envoyaient des milliers de poussières astrales à chaque éclat de rire, la lune les balayait de ses rayons d’argent, un souffle doux courrait le long de mon dos…

Un tremblement de terre provoqué par l’arrivée d’un troupeau m’éveillât juste à temps pour échapper aux langues assassines de ces doux animaux.

 

Vous commencez à me connaître maintenant, suffisamment en tous cas pour vous douter de ce que ces paisibles mammifères ont pu faire germer en moi !

 

J’ai donc essayé plumes, écailles et poils.

J’ai survolé les vallées encaissées de mes belles ailes d’aigle, j’ai dégusté des noisettes de mes dents d’écureuil, j’ai exploré les profondeurs de mes pattes de taupe.

 

Vous rigolez ! Vous ne me croyez pas !

Vous allez bientôt me dire que : « et bien sûr, après, ce furent les humains » !

 

Et non Monsieur, sachez que mes explorations m’ont appris suffisamment de choses pour ne pas me donner envie d’entrer dans la peau d’un autre, du moins, pas de cette façon.

 

Non, désormais je me passionne pour l’infiniment petit, le microscopique même.

Et si je m’introduis chez vous, Monsieur, ce sera, c’est décidé, par votre narine gauche, celle qui palpite si délicatement.

 

Vous ne me croyez pas ?

 

Comptez jusqu’à trois !

 

Un…

Deux…

Tr..ATCHOUMMMM !!!!

 

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