Un boulot ? Même pas une vie.

Publié par totoche sur 18 Juillet 2012, 17:11pm

Catégories : #réaction

Bonjour !

- « Fait moche hein ! »

Quelques pas de danse, casque sur les oreilles, elle chante.

- « Yes, … » A qui téléphone- t-elle ? J’ai l’impression qu’il s’agit d’un appel à sa famille. Le regard est rempli de nostalgie alors qu’un sourire fleuri sur ses lèvres. Une larme brille sur sa joue. Hier, le regard était dur, plein de révolte et pourtant soumis, le dos se voûtait, les pieds cognaient, la voix s’excusait.

Ce sont des gamines, de jeunes Blacks. Assises sur un muret, elles se maquillent, se changent, rient, pleurent. Combien de fois ai-je cherché du regard leurs poupées ? Pourquoi ne sont- elles pas dans la cour d’un lycée ?

Il y a peu de temps, c’étaient des Roms. Où sont-elles parties ? Qu’est-il arrivé à ces gamines ? Elles tournaient la tête quand les familles quittaient le campement, en contrebas de la route, pour aller à leurs journées de boulot, leurs journées de manche. Le campement est toujours là, les gamins courent dans l’herbe, le linge est étendu sous la pluie, mais elles ?

L’après-midi, viennent les cassées, les sans âge, les camées. Apathiques ou agressives, la rage au ventre, la souffrance jusqu’au bout des doigts, l’abdication dans le regard.

- « Salut. Ca tourne pas aujourd’hui. Salopards, y préfèrent les gamines. Et puis avec ce temps, y sortent pas, y préfèrent rester avec bobonne. Pis les flics, y z’arrêtent pas en ce moment ! T’as pas une cloppe ? J’vais les payer comment mes courses ? Ma fille est partie à Lidl, elle avait une voiture, elle voulait que j’aille avec, mais… J’ai froid. T’as fini le boulot toi ? T’as de la chance. Merde, pas un qui s’arrête, déjà que c’est mort. .. »

Il y avait aussi les anciennes, elles aussi ont disparu. Corps usés, fières dans leurs talons hauts, souvent alcoolisées.

- « Y’a le loyer à payer, le RMI, ça suffit pas, tu vies pas avec. La famille, la vraie, la rêvée, l’ancienne, l’actuelle, un mélange au présent qui aide à faire semblant. Les rivalités, les bandes, les flics, les clients : c’est pas des méchants, y z’ont besoin de nous, c’est leurs femmes qui veulent pas … Y’a pu d’argent nulle part, l’autre jour y’en a un qui voulait me payer avec un halogène ! Et l’autre salopard, pourriture, y vient avec un gosse dans la bagnole, merde alors !

- Pas trop dure ta journée ? Moi, on m’a proposé un boulot, un truc de réinsertion, dans un cantine. Je vais essayer. J’ai peur que ça suffise pas pour le pognon, mais de toutes façons en ce moment, y’en a plus ici non plus alors… J’ai rien à perdre, j’vais voir. »

Bonsoir…

Fleurs de papier

Harcèlement de rue

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